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« La politique étrangère de Jean-Bertrand Aristide » à la 29e édition de Livres en folie

todayMay 3, 2023 1

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Le Nouvelliste | 02 mai 2023: Publié en 2023 par de l’Imprimeur S.A, « La politique étrangère de Jean Bertrand Aristide.1991-1996/2001-2004 » est un ouvrage du docteur Jean Guy-Marie Louis, directeur de l’Académie diplomatique Jean-Price Mars du ministère des Affaires étrangères. Dans les pages qui introduisent le livre, ce diplomate chevronné s’est d’emblée livré dans une démarche conceptuelle pertinente sur la notion de politique étrangère. En effet, il a mobilisé l’approche de plusieurs auteurs, dont des spécialistes de renom évoluant dans le domaine des relations internationales, pour mieux regarder et analyser avec soin la spécificité de la diplomatie haïtienne, sous la présidence de Jean-Bertrand Aristide durant ses deux mandats.

L’auteur rappelle dans ce livre qu’analyser la politique étrangère d’un chef d’État est un exercice qui invite à prendre en compte non seulement la nature du régime, les réalités politiques internes, mais aussi la personnalité du chef d’État en question. C’est la raison pour laquelle les premiers chapitres du livre consistent à retracer la vie de l’ancien président Aristide, son origine sociale, son parcours académique, ses engagements sociopolitiques, les idéologies qui ont nourri ses pensées.  « Il est vraiment difficile d’appréhender la politique étrangère de Jean-Bertrand Aristide à partir d’une approche holistique. La personnalité du chef de l’État et la nature de son pouvoir, la complexité de ses deux mandats, les réalités internes du pays enfoncé dans une grave crise politique sont autant d’entraves à son inscription dans le cadre d’une théorie classique », écrit l’auteur.

Option préférentielle pour les pauvres

Selon le Dr Louis, inspiré de la théologie de la libération, Jean-Bertrand Aristide n’a jamais caché ses préférences pour les pauvres et son opposition à la dictature des Duvalier. Il confie que « toute son action est guidée par l’option préférentielle pour les pauvres proclamée par la théologie de la libération dont il est un ardent défenseur. »

Le professeur Jean Guy-Mairie Louis a misé sur l’histoire pour montrer, dans le cadre des réflexions émises sur le comportement des hommes politiques en Haïti qui développe un rapport pervers avec le pouvoir, l’incapacité des dirigeants haïtiens à trouver des compromis pour résoudre les conflits qui engendrent les crises à n’en plus finir dans le pays. Ce qui met à mal la politique étrangère d’Haïti.

Évoquant les notions de « dilemme et de paradoxe » pour comprendre la politique étrangère de Jean-Bertrand Aristide, en ce sens « il en distingue quatre moments : le premier se situe entre sa prestation de serment et le coup d’État-du 7 février au 30 septembre 1991. Le second concerne la période du gouvernement en exil-du 1er octobre 1991 au 15 octobre 1994. Le troisième va de la date du retour du président à la fin de son mandat du 15 octobre 1994 au 7 février 1996. Le dernier prend en compte son second mandant qui a été écourté de deux ans-du 7 février 2001 au 29 février 2004. »

Le flou de la politique étrangère du président Aristide

L’ancien directeur général du ministère des Affaires étrangères souligne le flou de la politique étrangère du président Aristide, analysée à l’aune de la rhétorique nationaliste et anti-impérialiste de ce dernier quand il était candidat. L’auteur avance que, dans l’élaboration d’une politique étrangère, « il faut réussir sur le plan interne à maintenir la paix et la sécurité, base de cohésion sociale nécessaire à l’existence d’une nation forte […] la politique étrangère d’un pays est fonction du rôle qu’il entend jouer sur la scène internationale, des réalités politiques, économiques et sociales et de ses préoccupations. Elle doit trouver un équilibre entre la conjoncture internationale et la défense de l’intérêt national, entre la défense du principe de souveraineté et la coexistence pacifique dans la compréhension mutuelle. »

Ainsi, le caractère trop radical et anticapitaliste du discours porté par Jean-Bertrand Aristide au moment de sa campagne électorale l’a mis face aux autorités américaines et certaines institutions financières internationales, dont la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, qu’il qualifie lui-même de Fonds Malfaiteurs internationaux (Fon malfektè entènasyonal). N’ayant pas de projets, en matière d’aide au développement, il ne pouvait pas trouver du support des institutions mentionnées dont la pratique est de financer des projets et non de donner de l’argent.  Le président Aristide avait eu du mal à tenir ses promesses de campagne, confronté à cette réalité et n’ayant pas disposé de moyens internes adéquats.

Forcé de quitter le pouvoir avec le coup d’État de 1991, le président Jean-Bertrand Aristide revient à Port-au-Prince après avoir perdu trois années de son mandat, résultat de ses multiples négociations avec la communauté internationale, notamment l’Organisation des Nations unies. Il recevait, pour paraphraser le docteur Louis, le concours de nombreux secteurs et de nombreux pays qui voyaient dans son retour au pouvoir le triomphe de la démocratie. Ainsi, « l’ancien prêtre de Saint-Jean Bosco, la voix des sans voix pour les uns, nouvelle figure du socialisme international et chantre de la théologie de la libération pour les autres, a su attirer des sympathies au sein même du Congrès des États-Unis d’Amérique. »

L’analyse des faits ayant marqué la politique étrangère du président Aristide a permis au directeur de l’Académie diplomatique Jean-Price Mars d’évoquer les tensions, les relations conflictuelles entre le gouvernement de l’ancien prêtre et la communauté internationale, dans sa gestion du pouvoir et la crise qui sévissait dans le pays. Il a aussi relaté la pression qu’a exercée la communauté internationale sur le gouvernement d’Aristide qui s’est vu refuser l’aide des bailleurs de fonds en raison de la crise multiforme qui sévisait en Haïti, ce qui fragilisait son pouvoir.

« Ayant exigé la solution de la crise pour reprendre sa coopération avec le gouvernement lavalas, la communauté internationale a, en quelque sorte, imposé un nouvel embargo au pays. » Face à cet état de fait, selon le docteur Jean Guy-Marie Louis, le gouvernement d’Aristide était dans l’incapacité de mettre en œuvre les projets conçus […] et ses partisans perdaient patience et se plongeaient dans la violence. « Incapable d’assurer le bien-être de la population faute de moyens financiers, suite au gel des montants alloués au titre de la coopération par les principaux bailleurs, la base du président se fissure », souligne l’auteur.

On notera qu’en plus de l’introduction et des pages conclusives, composé de dix (10) chapitres, cet ouvrage sur la politique étrangère du président Aristide est une grande contribution à la littérature scientifique existante sur l’histoire diplomatique d’Haïti. Les réflexions et les analyses qui y sont produites, en plus de leur objectivité, l’auteur n’ayant pas voulu altérer la vérité, retracent l’attitude de nos dirigeants qui, incapables de répondre aux désidératas de la population et dans la mise en œuvre de leur politique extérieure, vont vers la communauté internationale. Il s’agit bien d’un comportement que le docteur Louis critique à juste titre en affirmant que « nos dirigeants, dans le cadre de la mise en œuvre de leur politique étrangère pour Haïti, doivent se débarrasser de cette tentation de faire appel aux étrangers pour nous aider à résoudre nos problèmes. »

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